
LA FURIE
Histoires d'héroïnes
1. LE GANG DES SARIS ROSES
par Sarah Olivier
Je suis née dans la poussière
Née pour être justicière
On m’a mis trop tôt la marque poudrée sur le front
Cette trace rouge qui m’a fait lever le poing
Contre celui qu’on lève
Sur l’intouchable, la veuve et l’orpheline
Et tous ceux que l’on opprime
Vêtues de rose et munies de bâtons
Nous parlons fort et devant les maisons
La rage et l’amour chevillés au cœur
Chaque jour nous démêlerons le sort
Le gang des saris roses se bat encore
Je suis née pour être mère
Née pour être justicière
Si mon foulard blanc est tout maculé de sang
Ce bout de tissu deviendra notre uniforme
Mon bâton de bergère
Mon sari rose, sari de combat
Et l’on nous reconnaîtra
Vêtues de rose et munies de bâtons
Nous avançons jusque dans les maisons
La rage et l’amour chevillées au cœur
Les lois ancestrales ne font plus peur
Le gang des saris roses entend vos pleurs
Si vous plongez dans mes yeux verts
Mon regard de justicière
Vous verrez la nuit toute maquillée de rose
Et que la lune aussi à rallier notre cause
Vêtues de rose et munies de bâtons
Nous veillerons que dans toutes les maisons
La rage et l’amour nous guident chaque jour
Plus fortes encore grâce à notre bravoure
Le gang des saris roses se bâtera toujours
3. LA BESTIA
par Sarah Olivier
Il faut faire vite
La Bestia va arriver
Je me tiendrais sur le bas-côté
Prête à tout distribuer
Je vois déjà leurs bras se tendre
Les mains qui attraperont les petits paniers
Je ne verrai que leurs bras
Pas leur visage et pas leurs yeux
Je ne sais rien d’eux
Ils ne savent rien de moi
J’entends parfois leur voix
Ils crient: muchas gracias, muchas gracias!
Je vais devoir faire vite
Courir, courir, courir
Tout distribuer sans se blesser
Ils auront à manger
Il ne faut pas tomber
La Bestia va arriver
Rien ne peut l’arrêter
Ils ont tout quitté
Ils auront à manger
Il faut faire vite
Ne pas tomber
Ne pas trébucher
Tout distribuer
Il faut faire vite
Ils nous crieront: muchas gracias, muchas gracias!
5. SOEURS DE SEL
par Emilie Petit
Oh qu’elle est immense
La mer liberté
Qui danse sur l’horizon!
Oh quelle espérance quand vient la marée
Qui nous soulève en son nom!
De la mer Méditerranée,
Ses vents, ses vagues insaisissables,
On ne peut pas retirer le sable.
Sur les flots de mer Liberté,
Parmi se vents, ses vagues rebelles,
Les soeurs de sel sont inséparables.
Les soeurs de sel, écume indomptable
La mer est toute puissante
La vague est insaisissable
On ne peut pas retirer le sel
Aucune douleur
Aucune humaine laideur
N’ont soumis Djamila en son coeur ancré
Elle est puissante mer Liberté
Coeur marin, cri salé
Aucune raideur
Aucun revers des l’honneur
N’ont étouffé Gisèle en son corps ancré
Elle se déchaîne mer Liberté
Corps marin, cri salé
7. LES MOUCHES
par Eschyle
Nous serons les yeux fixes des maisons…
Le grondement du molosse qui découvrira les dents sur ton passage.
Le bourdonnement qui volera dans le ciel au dessus de ta tête, nous serons les bruits de la forêt, les sifflements, les craquements, les chuintements, les hululements.
Nous serons la nuit.
L’épaisse nuit de ton âme.
Nous nous poserons sur ton cœur pourri, comme des mouches sur une… une tartine.
Cœur saigneux, cœur pourri, cœur délectable.
Nous butinerons comme des abeilles le pus et la sanie de ton cœur.
Nous en ferons du miel, tu verras, du beau miel vert.
Nous sommes les suceuses de pus, les mouches.
Nous partagerons tout avec toi.
Nous irons chercher la nourriture dans ta bouche et le rayon de lumière au fond de tes yeux.
Nous t’escorterons jusqu’à la tombe et nous céderons la place qu’aux vers.
9. GRISELIDIS
par Grisélidis Réal
Toi, la Blonde, maman à la crinière jaune, assise en Sultane sur le tapis.
Toi, la Brune au museau de renard, dans la nappe nocturne de cheveux noirs qui te cache toute, relève la tête et crie, crie ta colère de femme et de petite fille…
Toutes belles et parées, vos poitrines découvertes comme des clairs de lune bordés de dentelle,
Et vos cuisses nues étincelantes, vos bottes de cuir, vos bagues de diamants…
Dans le cratère des dancing, dans le froid, la fumée, dans l’ombre silencieuse des voitures…
Oui, je suis une pute!
Et mon corps est votre instrument.
Je suis putain!
Je suis cachée sous des milliers de peaux que vous ne trouerez pas. Toutes sont chères, précieuses, douloureuses, douces, glorieuses. Je n’en enlève aucune sans l’avoir complètement remplacé, je mue, je suis serpent et femme, jamais usée, jamais blessée.
Oui, je suis une pute!
Et mon corps est votre instrument.
Je suis putain!
Laurent: Petit con genre flic, queue débile, n’en finit plus dans les cajoleries si on le laisse faire… mais éjacule vite. Ne me donne que 50 francs, une honte!
Peter: Musicien de jazz, mystérieuse, doux et violent. Aime être enculé longtemps, fourmis japonaises, vif et alerte, pâle, mince, vêtu des noir, un peu Pierrot lunaire. Baise en levrette, yeux bleus magnifiques, 100 francs
Marc: Homme bine baraqué, tatoué, simple d’esprit mais tout de même assez intelligent. Aime la nature, sentimental. Truand repenti, 100 francs
Yann: Immense type, queue très courte, jouit bien vite si on fait semblant de jouir à la pénétration, radin
Kader: Grand maigre, jeune et assez beau avec préservatif, 80 francs
Pedro: très poilu, jouit dans la bouche
Oscar: Immense queue pénible
Alain: évacuateur précoce, 70 frans
John: timide, 80 francs
Hugo: 120 francs
Je pose le masque de la femelle-servante, ma nudité est une armure chatoyante, inexpugnable, rien ne me vole, rien ne me vole et je ne rends pas, je prends.
Oui, je suis une pute!
Et mon corps est votre instrument.
Je suis putain!
La vraie révolution qui éclate aujourd’hui comme un immense soleil qui troue notre nuit de ses feux conjugués, visages du monde entier, femmes la main dans la main et les yeux dans les yeux, criant d’une voix unique ce seul mot: Liberté!
2. MINORDE
par Sarah Olivier
Un sari rose ou bien une perruque blonde
Toutes ces causes qui forment notre ronde
Un métier à tisser
Un cri salé
Une femme serpent, un bâton de berger
Amour étincelant cette liberté
La page blanche d’un jour
Une preuve d’amour
À sa table, s’invitent les esprits
Où, sans fard, les langues se délient
Au banquet, s’écoutent les esprits
Où, sans honte les larmes s’éparpillent
La sortie des usines au petit matin blême
Le cratère des dancing où plus personne ne s’aime
L’ombre d’une putain
Un cri marin
Au coeur d’un village sur des chemins furieux
Au creux de ton âme des mouches descendent des cieux
La main d’une Madone
Le coeur d’une baronne
À sa table, s’élèvent les esprits
Où, sans fard tous les yeux qui pétillent
Au banquet, s’envolent les esprits
Où, sans crainte c’est la vie qui sourit
4. DIANA
par Sarah Olivier
Le jour se lève sur Ciudad Juarez
La mystérieuse Diana cache ses tresses
Toute vêtue de nuit, elle se prépare
Pour prendre le bus qui l’emmène aux maquillas
Direction l’enfer pour toutes les victimes
Qui sortaient de l’usine
Le regard angoissé elles sont déjà toutes là
Leurs bouches serrées cachent quelque chose qui ne se dit pas
Diana plante son regard dans celui du chauffeur
Elle ne parle pas, il a peur
Deux ou trois balles tirées de sang froid
Les sirènes qui retentissent
La police est à ses trousses
Sur le visage, le sang qui dégouline
Une perruque blonde laissée sur le trottoir
La cité des mortes me cachera
Telle Artémis, je vous vengerai
Toutes vos blessures, je cicatriserai
Vous les jeunes-filles abandonnées
Car je suis Diane la chasseresse
La biche insaisissable
Ecoutez! J’aboierai partout dans la ville
Le jour se couche sur la ville et les maquillés
La mystérieuse Diana reprend sa place
Toute tachée de sang, elle se cache
Dans les jupons des cartels de la ciudad
Il ne reste qu’un portrait robot
Et le silence des filles
Deux ou trois balles tirées de sang froid
Les sirènes qui retentissent
La police est à ses trousses
Car je suis Diane la chasseresse
La biche insaisissable
Ecoutez! J’aboierai partout dans la ville
6. COLETTE
par Sarah Olivier
Je ne veux pas dissoudre la magie de mon enfance
Le chaud désordre dans la maison
Les chiens, les poules, les moutons
L’araignée nourrie au chocolat
Je suis un bijou tout en or
Dans le jardin l’âme s’évade
Je le contemple et je m’en vais
Vers une autre vie citadine
Quand reverrais-je ce paradis?
Saint Sauveur et tous ses parfums…
Tordue à mon petit bureau
Je laisse parler mon corps et ma peau
Pour des histoires et des comptines
De Claudine au Music-hall
J’en ai fait du chemin, Monsieur
Je m’habille comme un homme
Ou torse nu, mon vieux
Je suis la Vagabonde
Debussy, les colombes
C’était la bohème à Paris
Je suis un oiseau de nuit
C’est avec les mots de tout le monde que j’écris comme personne
Ma plume est vibrante et étonne
Je suis gourmande et je mords
Colette moderne éternelle
Kiki la doucette, les chats bleus
Mon sein se dénude et je rêve
D’Egypte sombre et magnifique
Et d’une ingénue libertine
De Claudine au Music-hall
J’en ai fait du chemin, chéri
Je m’habille comme un homme
Ou torse nu, Monsieur
Je suis la scandaleuse
Natul mandes, les nébuleuses
C’était la fantaisie de Paris
J’étais un oiseau de paradis
8. LES NORNES
par Sarah Olivier
Au pied du grand arbre sous nos yeux d’or et de feu
Des racines jusqu’au cosmos le début et la fin
Dans le brouillard éternel nous écoutons le vent
Les premiers jaillissements des vies que nous donnons
Sans relâche mes sœurs sur nous les siècles sont tombés
Et toutes les vies par flot lourd nous ont inondées
Des branches à l’infini, plus de trêve ni de paix
Sous nos rigides paupières s’affrontent les ténèbres
Du haut des cieux muets, la vie
Du haut des cieux muets
Du haut des cieux muets
Sans relâche, mes sœurs avec force et ardeur
Nous gravons le destin des hommes
Nous tisserons tous les destins
Nous sommes les filles du temps éternel
Nous tisserons jusqu’à demain
C’est depuis les jours anciens à l’aube de l’univers
Enveloppées d’un tourbillon de brume nous agissons
Nous bénissons d’un souffle chaud le chaos de la vie
Nous purifions les esprits qui montent vers les astres
Et tel un torrent jaillissent les âmes humaines
Le présent échappe tout autant que l’avenir
Et sous le vieil Yggdrasil sous l’écorce sacrée
Nous tisserons à l’infini le monde et le passé
10. ROSA PARKS
par Sarah Olivier
C’est à Montgomery
Alabama
Que commence l’histoire de ma vie
C’est à Montgomery
Alabama que s’écrit l’histoire de nos vies
Je suis un oiseau noir enfermé dans un monde
Où mon coeur est plus sombre que la couleur de mes plumes
Je ne veux plus être enfermée dans cette rage
Mais me sentir libre de me percher n’importe où
Je sais bien que sans courage tous les rêves meurent
C’est à Montgomery
Alabama
Que commence l’histoire de ma vie
Quand l’esprit s’décide
S’en va la peur
Pour vivre libre, écoute ton coeur
Je veux vivre ma vie dans la lumière
C’est à Montgomery
Alabama
Que commence l’histoire de ma vie
Novembre 56
Washington D.C s’écrit l’histoire de nos vies
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